Le 19 Août 1994, Serge Savard échange le capitaine Guy Carbonneau aux Blues de Saint-Louis. En retour, il obtient Jim Montgomery.

L’échange de Guy Carbonneau , capitaine du Canadien, a fait couler beaucoup d’encre. Une blessure qui met du temps à se refermer. Et la cicatrice fait un peu mal au moment où Carbo fait son entrée au temple de la renommée

Guy Carbonneau

Pourquoi Serge Savard échange Guy Carbonneau .

On parle de la fameuse photo avec le doigt,mais ce n’était pas la raison principale. Il y avait une panoplie de choses.

Guy Carbonneau ( podcast drette su’l tape)

Voici le portrait. A l’été 1994, le numéro 21 des Canadiens de Montréal a alors 34 ans. Il va arriver en fin de contrat. Le capitaine du Canadien qui a subi une opération aux deux genoux à l’été 1993 devient échangeable aux yeux de Serge Savard, qui sait qu’il doit rajeunir et améliorer l’équipe. Dans une saison en dents de scie pour l’équipe. Carbonneau est considéré en fin de carrière par l’organisation mais conserve une bonne valeur en cas d’échange.

Carbo était très populaire, mais avait ralenti. Dans mon esprit, il ne pouvait plus continuer à Montréal

Serge Savard – Canadiens jusqu’au bout

Après une défaite face aux Bruins en première ronde des séries, Carbo, qui n’a pas sa langue dans sa poche, sera au cœur d’une controverse avec son coach Jacques Demers.

Et au lendemain du post Mortem, alors qu’il joue au golf avec Roy et Damphousse, un geste de colère envers un journaliste fait la une du journal de Montréal et se transforme en scandale.

Ajoutez à cela que que Carbo est un représentant de l’association des joueurs dans un conflit face à la LNH ( qui va mener au lockout ) et vous avez de bonnes pistes sur pourquoi il a été échangé.

Podcast Drette su’l tape avec Guy Carbonneau

Guy Carbonneau a 34 ans

Carbo a 34 ans. Il vient de passer 12 ans avec le Canadien. Obtenir 3 trophées Selke et deux coupes Stanley demande beaucoup de sacrifices. Et le prix à payer est souvent une paire de rotules à changer. A l’été 1993, Guy Carbonneau subit une arthroscopie à chaque genou. Même s’il ne loupe que 5 matchs durant la saison 1993-94, c’est un signe de vieillissement.

» … Je n’avais pas demandé à être échangé dans ces années la. C’est sur que j’avais 34 ans , j’avais eu des difficultés l’année d’avant, j’avais un genou qui … on ne savait pas ce que c’était, j’ai passé des radiographies, ça avait été difficile»

Guy Carbonneau ( podcast drette su’l tape)

Une saison en dents de scie

Le Canadien a gagné la coupe en 1993 et les attentes sont grandes. Durant l’été, Jacques Lemaire a quitté son poste d’entraineur adjoint. Dès le début de la saison suivante, Jacques Demers ressent un manque d’implication des joueurs. L’équipe manque aussi un peu de talent. Le coach le sait déjà, la saison 93/94 d’annonce difficile. Serge Savard annonce rapidement que des changements sont à venir. La table est mise.

Après un mois d’Octobre engageant, c’est la descente dans le classement. Fin Décembre, le Canadien n’est plus dans le portrait des séries.

Janvier 1994, le Canadien se réveille. Roy et Damphousse sont en feu, tout le monde suit. Mais à la fin de la saison, l’équipe s’écroule de nouveau, perdant 3 des 12 derniers matchs. Le CH finit par se qualifier pour les séries avec un honorable 96 points, mais sans passion.

Malgré ces hauts et ces bats, Carbo a amassé 14 buts / 24 points en 79 matchs. Pour un centre défensif, pour un joueur qu’on pensait presque fini, pas mal du tout ! Mais cela ne suffira pas .

Appendicite et controverse

Au premier tour des éliminatoire, le Canadien affronte les Bruins de Boston. Et l’homme des séries, c’est Patrick Roy. Si l’indiscipline des défenseurs fait perdre le premier match au CH, l’équipe rebondit et gagne le second. Patrick Roy stoppe 40 tirs.

La jour avant le match 3, le gardien souffre d’un mal de ventre et ne peut s’entrainer. Il est hospitalisé. Appendicite. Ron Tugnutt est en poste pour la troisième joute, l’équipe perd.

Match numéro 4, Roy est de retour devant les filets. Appendicite ou pas, il stoppe 39 tirs. L’opération attendra l’été. Match 5, Roy bloque 60 tirs !

La controverse entre Carbonneau et Demers intervient après le retour de Patrick Roy au quatrième match. Jacques Demers mets beaucoup Patrick Roy en avant. Pour lui le Canadien est trop affaibli sans son gardien. La remarque pique Guy Carbonneau qui lui reproche de ne voir que par Roy .

Jacques est un gars émotif, mais s’il veut continuer à diriger à long terme, il devra changer sa façon de dire les choses

Guy Carbonneau ( source : Jacques Demers – En toutes lettres )

La controverse enfle. Jacques Demers a beau dire qu’il n’y a pas d’antagonisme entre lui et Carbo, il n’apprécie pas la remis en cause et les dents grincent à la direction. Après la fin de la saison, Jacques Demers tente de mettre un point final à cette histoire :

Roy est la seule grande vedette du tricolore, chose qu’on devrait accepter

Jacques demers ( source : Jacques Demers – En toutes lettres )

Post Mortem

1er Mai, Serge Savard et Jacques Demers rencontrent la presse. Le message est clair, il va y avoir des changements. Et lorsque les journalistes abordent le cas Guy Carbonneau, Serge Savard n’y va pas par quatre chemins .

Je ne sais pas si je peux encore gagner avec Carbonneau. Certainement pas pour les dix prochaines années en tout cas. Il va passer dans le tordeur comme les autres.

Dans le sport, les athlètes viennent et quittent. C’est toujours pénible. Maurice Richard, Guy Lafleur et moi sommes passés par là.

Je vais regarder attentivement le dossier de Carbonneau pour le bien de l’équipe.

Serge Savard Post mortem , 1er Mai 1994

Voila, il n’y a aucune ambiguïté . Place aux jeunes. Savard pense que Benoit Brunet va devenir leur homme de confiance pour les missions défensives. Guy Carbonneau sera échangé, ce n’est qu’une question de temps.

Le doigt d’honneur

Le Canadien est éliminé. Roy, Damphousse et Carbo essaient d’avaler la défaite, jouent au Golf de Rosemère. Normand Pichette, journaliste du journal de Montréal se tient au loin avec un appareil photo, tentant de prendre une image des joueurs du Canadien.

Excédé par cette intrusion, Carbo fait un doigt d’honneur pour lui dire de dégager. La photo est dans la boite et à la une du journal le lendemain. Les cendres de la défaite sont encore chaudes, c’est le scandale !

journal de Montréal - 3 Mai 1994
Journal de Montréal – 3 Mai 1994

Dans un entretien donné à la gazette, Carbonneau dit à l’époque :

» Je suis déçu qui le journal ait publié la photo. Ce n’est pas professionnel. Ils n’avaient pas le droit d’être la. Nous jouions au golf tranquillement, pour essayer d’oublier la dernière année …

J’espère que les partisans ne pense pas que c’est à eux que s’adressait le doigt d’honneur, j’étais juste mécontent de voir le photographe ici et c’était ma façon que lui dire de s’en aller ”

Guy Carbonneau – Entretien à la Gazette – 20 Aout 1994

Le capitaine est convoqué au forum et doit écrire une lettre d’excuses au partisans et au journaliste. Mais rien n’y fera.Les rumeurs d’échange ne feront plus que s’amplifier Trois mois plus tard, Carbo prend la route de Saint-Louis.

A écouter, cet extrait du podcast tellement hockey, avec Martin Leclerc, qui revient sur l’évènement du doigt d’honneur et sa gestion au journal de Montréal

Tellement hockey, extrait épisode 39

Négociations houleuse

En 1994, les joueurs , une fois n’est pas coutume, sont à couteaux tirés avec la ligue nationale. Guy Carbonneau est représentant des joueurs dans ces négociations qui vont mener au lock-out. L’organisation apprécie t’elle ? Peut-être pas. Et on se souvient encore de ce qui est arrivé à Doug Harvey.

Le 19 Août, Serge Savard envoie Guy Carbonneau chez les blues de St-louis, dirigés par Ronald Caron, en retour du jeune centre Jim Montgomery.

Guy Carbonneau après l’échange

Le temps a fait son œuvre et si vous écoutez le podcast drette su’l tape , Carbo semble en paix avec l’échange et Serge Savard . Mais à l’époque, ce fut bien sur une autre affaire :

“C’est un gros choc, j’étais totalement pris par surprise. On ne s’attend jamais vraiement a être échangé . On y pense, j’en avais parlé avec Larry ( Robinson ) et Steve Shutt, mais je n’étais pas préparé à entendre ça ce matin ”

Guy Carbonneau – Entretien à la Gazette – 20 Aout 1994

Après une année avec les Blues, Guy signe avec les Stars de Dallas avec lesquels il passera 5 saisons et gagnera une autre coupe Stanley.

On connait la suite. Bob Gainey revient à Montréal comme directeur général, embauche carbo, puis le nomme entraineur chef, direction le printemps Halak. Il le licencie aussi. En 2019, Guy Carbonneau fait son entrée au temple de la renommée. C’est Bob Gainey qui l’accueille.

Carbonneau – Montgomery, un mauvais échange ?

Guy Carbonneau a joué 6 ans de plus dont 5 à Dallas, soit plus de 400 matchs. Il remporte une autre coupe Stanley en 1999 avec les Stars. Jim Montgomery, qui porta le numéro 22 , fut étiqueté AHL, n’aura joué que 5 parties avec le Canadien avant d’être libéré et de quitter le club.

Mauvais échange pour Serge Savard, ce qui était aussi l’avis de Jim Montgomery.

« Il ( le directeur général ) m’a dit qu’il voulait juste m’informer que j’avais été échangé contre Guy Carbonneau. Je lui ai ensuite dit : «qui d’autre part avec moi?» Il a répondu : «personne» et je lui ai mentionné que c’était une mauvaise transaction pour Montréal.»

Jim Montgomery – Interview sur le site des blues

Guy Carbonneau est toujours le dernier capitaine du Canadien a avoir soulevé la coupe Stanley. Il a été intronisé au temple de la renommée du hockey en 2019.

Carbo chez les voyageurs de la Nouvelle Écosse
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Amateur de hockey , je m'intéresse à l'histoire du sport et à celle du Canadien de Montréal. Vous lisez actuellement mon blog